Analyse
Le gouvernement Castex en marche sur un chemin de crête…

Avec le rebond automnal du coronavirus, la marge de manœuvre du gouvernement Castex est étroite pour garantir « en même temps » la santé des Français et maintenir la vie économique et les services essentiels du pays.

 

Le Premier ministre Jean Castex lors d’une visite au CHU de Lille, le 16 octobre 2020 – DR

L’embellie aura été de courte durée pour le « Monsieur déconfinement » d’Emmanuel Macron, Jean Castex. Le maire de Prades, sous-préfecture tranquille des Pyrénées Orientales, à la carrure de rugbyman et à l’accent cadencé du Sud-Ouest, avait su gérer avec doigté et pragmatisme la sortie de l’épreuve inouïe de huit semaines de confinement général des Français.

Le nouveau Premier ministre se serait bien accommodé d’une reprise économique en pente douce, esquissée au début de l’été et volontairement soutenue par un ambitieux Plan de relance de 100 milliards d’euros présenté deux mois, jour pour jour, après son arrivée à Matignon…

Las,  le rebond automnal du coronavirus a contraint les autorités à donner un nouveau tour de vis à la vie en société et à décréter, une fois de plus, l’état d’urgence sanitaire…

Comme si ce coriace Covid-19 se plaisait à jouer une histoire sans fin!

Quoi que fasse le gouvernement, il sera critiqué. Il sait qu’en de telles circonstances, il n’y a pas de bonne solution, mais seulement la possibilité de choisir entre deux maux... avec le risque de choisir le pire.

La décision d’opter pour l’instauration d’un couvre-feu à compter du 17 octobre, de 21 heures à 6 heures, pour une durée probable de 6 semaines, dans 9 métropoles – dont Paris et la grande région parisienne – est, ne nous y trompons pas, un succédané de confinement… Et il n’est pas sûr que le couvre-feu d’aujourd’hui permettra d’éviter le confinement demain.

L’impact en sera particulièrement dur sur des secteurs d’activité déjà durement éprouvés depuis des mois : restauration, hôtellerie, tourisme, cinémas, théâtres, spectacles, événementiel, salles de sports, transports…

Des dizaines de milliers de PME, d’indépendants, de commerçants et d’artisans ont déjà subi, ces dernières années, des pertes de chiffres d’affaires et donc de revenus, à cause du mouvement des Gilets Jaunes, des grèves à répétition pour la défense du système de retraite, puis, au début de cette année, du fait du confinement, et pour certaines de l’arrêt administratif de leur activité…

L’été 2020 leur avait apporté des signaux encourageants laissant espérer un retour progressif à « une vie normale » et donc  à la reprise des affaires… Le sourire, même masqué, était de retour avec le soleil!

Avec le resserrement des contraintes sanitaires qui pèsent particulièrement sur elles, beaucoup de PME ne devront désormais leur survie qu’aux aides financières de l’État Et certaines, les plus impactées ou les plus fragiles, n’auront d’autre issue que le dépôt de bilan.

Le gouvernement, par la voix de son ministre de l’Économie Bruno Le Maire, aux avant-postes des opérations de sauvetage, assure les entrepreneurs qu’il se tient à leurs côtés, et qu’il les soutiendra « tant que durera la crise ». « Quoi qu’il en coûte » selon l’expression devenue célèbre du président Macron.

Mais des pans entiers de l’économie française peuvent-ils vivre longtemps sous perfusion d’argent public?

Va-t-on assister à une « nationalisation  » rampante de l’économie française, dont les effets à moyen terme pourraient se révéler vénéneux?

C’est déjà près du quart du PIB, plus de 500 milliards d’euros, qu’aurait mobilisé l’État français en aides diverses, dispositifs de soutien et allègement de charges. Au prix d’un creusement abyssal des déficits budgétaires et d’une explosion de la dette publique…

Pour un entrepreneur, il faut le rappeler, le meilleur soutien qu’il puisse souhaiter, c’est le retour de l’activité et du chiffre d’affaires!

crédit photo : Silviu Costin Iancu – Pixabay

Mais le moins qu’on puisse constater, c’est que le climat actuel n’est pas de nature à redonner le moral aux Français et à les inciter à consommer et à investir.

Garantir la santé des Français, éviter la saturation des services d’urgence hospitaliers, empêcher une kyrielle de faillites et de plans sociaux, permettre la continuation de la vie économique et des services essentiels, contenir les dérapages des comptes publics et de l’endettement… le gouvernement Castex doit faire tout cela « en même temps »! … Et ce, dans une France lézardée, travaillée en profondeur par des tensions sociales, idéologiques, ethniques, religieuses…

Le gouvernement Castex marche décidément sur un chemin de crête. Entre des volcans.

J.G.

>>>Sur ce sujet, lire aussi notre dossier  Le plan #FranceRelance réussira-t-il à relever une économie mise sous perfusion?