FRANCE 2023
L’épreuve de vérité

Le psychodrame national qui se joue à chaque fois que l’on remet en chantier la réforme des retraites, interroge la viabilité de notre « modèle social ». D’autant que la France aborde 2023 dans de mauvaises conditions : stagnation, inflation, déficits, crise énergétique, protestation sociale, faillites…  Le temps n’est-il pas venu de redéfinir les rôles respectifs du secteur public, des entreprises privées et de la société civile?

 

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Accros au  « Quoi qu’il en coûte » , mantra gouvernemental pendant la crise sanitaire, une majorité de Français ne souhaitent qu’une chose : que l’argent magique continue de pleuvoir!

(crédit photo : Pixabay)

Que l’État continue de mettre la main à la poche…  Et si celle-ci est vide, qu’à cela ne tienne, il n’a qu’à puiser dans la poche des autres, précisément les « milliardaires » du CAC 40, nouvelles cibles faciles des Verts, de la gauche extrême et des ONG gauchisantes.

Voici pourquoi la nécessaire réforme de notre système de retraite, sans cesse remise à demain, soulève en ce début d’année 2023, un large front du refus.

Le déficit menace l’avenir de nos retraites par répartition? L’État paiera en taxant les plus riches! Telle est l’argumentation brandie par les opposants à l’allongement de la durée des cotisations…

Le spectre de paralysie de l’économie. Après le mouvement des Gilets jaunes en 2018, les grèves contre la précédente tentative de réforme des retraites en 2019, la mobilisation unanime des syndicats et des organisations de gauche contre le projet de loi présenté en Conseil des ministres le 23 janvier, et la coagulation de tous les mécontentements, font peser la menace d’une paralysie de l’activité économique. Ce qui fragiliserait davantage encore de nombreuses PME, TPE et commerces dont la situation s’est dégradée en 2022 sous l’effet de l’augmentation des charges, des prix des matières premières et de l’énergie (lire ci-dessous).

Bien qu’en perte d’influence dans les entreprises privées, les syndicats gardent depuis la Libération de puissants leviers de contrôle sur les secteurs stratégiques des transports et de l’énergie.

Or, le gouvernement l’a répété, le « Quoi qu’il en coûte » c’est fini! D’ailleurs, le voudrait-il, qu’il n’en n’a plus les moyens.

Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique.
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« Gueule de bois »

« Il y a en France une ivresse de la dépense publique. Comme si la dépense publique effaçait toute difficulté, réglait tout problème, enjolivait la réalité.  Cette ivresse est une illusion. Elle conduit tout droit à la gueule de bois, qui porte un nom : les taux d’intérêt. Pour la première fois depuis quinze ans, les taux d’intérêt ont dépassé les 3% en France… »   
Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, dans son message de vœux le 5 janvier 2023, qui a annoncé le lancement des Assises des Finances publiques, avec la perspective de rétablir l’équilibre des comptes de la nation, « sans augmentation des impôts ni de dette supplémentaire ».

 

 

 

Avec un déficit budgétaire qui a dépassé les 150 milliards d’euros en 2022 (soit 60% des recettes du budget!), doublé d’un déficit du commerce extérieur qui a bondi à plus de 160 milliards d’eurospreuve de l’insuffisance de notre offre productive sur les marchés internationaux – avec un endettement public qui franchit la barre historique des 3 000 milliards d’euros, la France ne peut plus se permettre de dépenser sans compter.

D’autant que la conjoncture s’annonce particulièrement tendue en 2023, pour la France, comme pour l’Europe et pour de nombreux Etats dans le monde qui voient leurs courbes de croissance économique au mieux stagner, sinon s’enfoncer vers la récession. Sous l’effet d’une conjonction délétère de facteurs adverses : poursuite de la guerre russe en Ukraine, regain de l’inflation, hausse des prix des matières premières, crise énergétique, augmentation des taux d’intérêt…

Avec en toile de fond, le dérèglement climatique et les défis pressants de trois grandes transitions de notre temps : environnementale, digitale sociétale.

Stagnation, inflation et prix de l’énergie plombent les perspectives de l’économie française en 2023

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Après 2,5%  de croissance du PIB en 2022, les perspectives économiques s’annoncent maussades pour 2023,  proches de la stagnation : l’Insee projette 0,4% de  croissance sur l’année et la Banque de France 0,3%.

L’une des principales inconnues est le niveau de la consommation, premier moteur de notre économie.

Face à une forte inflation (+12% de hausse des prix des produits alimentaires!), et à la flambée des tarifs de l’énergie et des carburants, les ménages sont conduits à arbitrer leurs achats, voire à couper dans certaines dépenses (loisirs, restaurants, voyages…). Les commerçants et la grande distribution le ressentent dans leurs chiffres quotidiens.

Un chômage élevé. Alors que près d’un million d’emplois nouveaux ont été créés depuis 2019 (dont 300 000  au cours des trois premiers trimestres 2022), le taux de chômage reste toujours élevé en France, autour de 7,5%, supérieur à la moyenne de la zone Euro (6,5%), ou de la moyenne européenne (6%), et le double du taux allemand (3%!).

Alors même que de nombreuses entreprises éprouvent des difficultés à recruter, notamment dans des secteurs comme la restauration, l’hôtellerie, les transports, les services aux personnes…

L’opposition à la réforme des retraites se nourrit des difficultés éprouvées par les Français dans un tel contexte et des mécontentements accumulés au cours des années.

La mèche qui a embrasé la révolte des Gilets jaunes en 2018 pourrait se rallumer … Car tous les carburants de la grogne populaire sont là : vie chère, sous-emploi structurel, déshumanisation du quotidien, aggravation de la complexité normative, crainte du déclassement, défiance à l’égard des élites dirigeantes…

Quelques signes encourageants dans la  grisaille ambiante

« Les perspectives conjoncturelles des mois à venir sont moroses », analyse Sylvain Bersinger du cabinet Asteres : « L’inflation en France (environ 6 % fin 2022) devrait augmenter en début d’année 2023 avec le relèvement de 15 % du bouclier tarifaire sur le gaz et l’électricité et la suppression de la « prime à la pompe ». En janvier et février, l’inflation se rapprocherait de 7 %, avant de ralentir lentement à partir du printemps. De ce fait, le pouvoir d’achat et la consommation des ménages en France resteront sous pression en début d’année.  Certaines évolutions récentes apportent cependant une pointe d’optimisme. Les prix du gaz se sont fortement détendus (…) Le prix du pétrole oscille pour sa part aux alentours de 85 dollars le baril, soit un niveau nettement inférieur à celui du printemps 2022. La situation s’améliore également du côté des chaînes d’approvisionnement dont le degré de tension se rapproche de son niveau d’avant la crise sanitaire (…) En Europe, les coupures de gaz et d’électricité redoutées n’ont pas eu lieu (et ne devraient pas se produire cet hiver), ce qui a conduit à une amélioration du consensus des
économistes qui prévoit désormais une croissance légèrement positive en 2023 en zone euro. »

 

Les entrepreneurs restent confiants, mais…

Les chefs d’entreprise gardent le moral, bien que la situation générale les inquiète .

Dans la dernière enquête de conjoncture de Bpifrance publiée le 10 janvier, l’indicateur des perspectives d’activité pour 2023 perd 25 points sur un an, atterrissant nettement sous sa moyenne historique (+17) : « La forte incertitude entourant l’environnement économique, les difficultés d’approvisionnement, anticipées encore prégnantes, et la facture énergétique attendue en hausse, expliquent vraisemblablement ce repli », analyse l’institution.

Pour Philippe Mutricy, directeur des études de la banque publique d’investissement, « alors que les marges de manœuvre se réduisent, les perspectives s’assombrissent pour 2023, en particulier pour les entreprises les plus exposées à la crise énergétique. Les indicateurs laissent attendre une activité et un investissement atone cette année. »

PGE. Pour amortir les chocs successifs (hausse des matières premières et du coût de l’énergie) les PME puisent dans leur PGE (prêt garanti par l’Etat). Malgré les tensions de trésorerie, les risque de défaut de remboursement semblent pour l’instant circonscrits.

Malgré les difficultés croissantes de trésorerie attendues, le taux de défaut des PGE reste encore « limité » (5%), estime Bpifrance : « Parmi les TPE-PME déclarant avoir souscrit à un PGE, 57 % déclarent l’avoir consommé dans sa majorité (contre 53 % en mai 2022), dont 38 % dans sa quasi-totalité. S’agissant de l’horizon de remboursement, 81 % des dirigeants interrogés envisagent d’amortir leur prêt sur plusieurs années.  5 % des répondants craignent ne pas être en mesure de rembourser leur prêt, une proportion stable sur un an. »

 

L’enquête mensuelle OpinionWay pour CCIFrance fait apparaître une baisse du moral des entrepreneurs, qui ont beaucoup moins confiance dans les perspectives de l’économie française (22% de confiants) ou mondiale (19%) que dans la situation de leur propre entreprise : 59% de confiants, en baisse de 6 points.

La montée de l’inflation préoccupe plus de la moitié des dirigeants sondés par OpinionWay : ils s’inquiètent des conséquences sur la réduction de leurs marges commerciales – car ils ne pourront pas la répercuter intégralement sur leurs prix de vente – et sur la viabilité de leur entreprise.

La crise énergétique est la deuxième source d’inquiétude, avec un manque de visibilité sur les hausses de tarifs en 2023 pour les 45% des sondés dont le contrat de fourniture d’électricité arrive à échéance au cours de cette année. Les 4% qui ont renégocié leur contrat en 2022 ont enregistré une augmentation moyenne de 133%.

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Aides publiques-énergie, mode d’emploi : les CCI à l’écoute des entrepreneurs

Pour expliciter les différents dispositifs d’aides publiques destinées à alléger la facture énergétique, – assez compliqués à interpréter -, et pour orienter les chefs d’entreprise dans leurs démarches vis-à-vis des administrations, CCIFrance a mis en place un portail Internet ainsi qu’un numéro d’appel gratuit : 0805 484 484

 

 

Complexité administrative. Beaucoup de dirigeants estiment que la gestion de l’entreprise s’est alourdie au cours des années du fait de la complexification des obligations et contraintes réglementaires, notamment dans les secteurs de la construction et du commerce, souligne l’enquête de CCIFrance. Face à cette complexité normative, les dirigeants interrogés jugent que les administrations de l’État sont davantage dans un rôle de contrôle (59%) et de sanction (52%), que dans un rôle de conseil vis-à-vis des entreprises (27%).

La dernière enquête de l’Ifop pour le Medef, publiée en janvier, fait aussi ressortir l’inquiétude des dirigeants d’entreprise face à l’augmentation des prix de l’énergie, surpassant leurs craintes vis- à-vis des difficultés de recrutement : les hausses des prix de l’énergie sont citées par 57% des dirigeants (une augmentation depuis +10 points par rapport à aout 2022) en tête des sujets de préoccupation, devant les difficultés à recruter (41% de citations, soit -10 points par rapport à août 2022).

« La succession de crises (covid-19, tensions économiques et sociales, conflit international, retour de l’inflation, augmentation des prix de l’énergie) a pour conséquence une anticipation de plus en plus forte de la part des chefs d’entreprises vis-à-vis des répercutions possibles sur leur activité », commentent les auteurs de l’étude.

S’ils se montrent globalement optimistes (82%) quant à la capacité de leur entreprise à affronter cette conjoncture adverse, ils sont majoritairement pessimistes vis-à-vis de la situation économique française et anticipent de fortes répercussions sur tous les plans : seuls 43% des dirigeants se montrent optimistes vis-à-vis de la situation économique française (dont seulement 3% de « très optimistes »), soit un écart de -9 points par rapport à août 2022. « Ce score se rapproche ainsi de l’un des plus faibles niveaux observé en août 2020 (44%, puis 37% en décembre 2020), en pleine période de crise sanitaire. »

Parmi les motifs de confiance dans leur entreprise, le bon niveau des carnets de commande, les mesures gouvernementales pour atténuer le choc énergétique, l’espoir d’une amélioration progressive de la conjoncture.

Cependant 7 dirigeants sur 10 redoutent les mouvements sociaux dans les semaines à venir,  bien qu’ils estiment unanimement (96%) que le dialogue social fonctionne bien dans leur entreprise…

Concernant les perspectives de développement et d’investissement, les sondeurs constatent l’attentisme des chefs d’entreprise en ce début d’année, lesquels privilégient plutôt le « statu quo ».

Si 43% des dirigeants prévoient d’augmenter la rémunération de leurs collaborateurs (score identique à celui observé en août 2022 lors de la précédente enquête), seuls 34% envisagent d’augmenter leurs effectifs dans les mois qui viennent (43% en août 2022),

crédit photo : Gerd Altmann -Pixabay

Les défaillances d’entreprises repartent en flèche

La dégradation de la conjoncture entraîne, comme on pouvait s’y attendre, une augmentation des défaillances d’entreprises, après une accalmie en 2020/21, essentiellement due aux aides publiques octroyées pendant la crise sanitaire.

En 2022, le nombre de défaillances enregistrées a bondi de près 50% par rapport à l’année précédente! « Un rythme annuel jamais connu qui confirme l’accélération de la sinistralité entrepreneuriale », souligne Altarès : avec 42 514 procédures enregistrées, le volume des défaillances remonte à son niveau de mai 2020. La tendance est restée forte sur le dernier trimestre de l’année (+48 %) après l’envolée de l’été (+70 %).

Les jeunes entreprises sont particulièrement fragilisées avec plus +94,2 % d’augmentation des défaillances!

Selon Thierry Millon, directeur des études d’Altarès,  le nombre de défaillances en 2023 pourrait « nous ramener aux valeurs de 2017 au-delà de 55 000 (entreprises), un nombre certes important mais plutôt raisonnable au regard du contexte très difficile que nous traversons. »

« Pour certaines TPE et PME, les chances de survie sont compromises », estime l’expert. « Pour certaines, la fragilité de leur structure financière est en cause. Pour d’autres c’est paradoxalement leur incapacité à honorer des carnets de commande pourtant bien remplis, qui pourrait les amener au défaut. En cause, les difficultés d’approvisionnement, l’explosion des coûts des matériaux et les problèmes de recrutement. Les contraintes financières (remboursement des dettes Covid et notamment PGE ; inflation ; hausse des taux ; facture énergétique, etc.) sont malheureusement vouées à peser toujours plus lourd sur les entreprises »

Allianz Trade   pour sa part, évalue le nombre de défaillances à 53 200 entreprises en 2023. Toutefois, la compagnie estime que les récentes mesures publiques de soutien aux entreprises pourraient limiter la hausse des défaillances et permettre à 6 700 d’entre elles d’éviter le dépôt de bilan en 2022 et 2023.

La situation est particulièrement tendue parmi les TPE (moins de 11 salariés), s’alarme le Syndicat des indépendants (SDI) qui  craint une « hémorragie massive » parmi les 2,1 millions d’entreprises de cette catégorie.

Graves difficultés de trésorerie.

Selon une enquête menée par le SDI, fin novembre 2022, auprès d’un échantillon de 2000 TPE,  30% feraient état de graves difficultés de trésorerie  et 40% d’entre elles, soit 252.000 entités,  estiment que la situation actuelle de leur entreprise les amène à considérer une cessation d’activité d’ici la fin du 1er semestre 2023. Dans 54% des cas, les sondés envisageraient de jeter l’éponge et de procéder à une cessation volontaire d’activité, « signe indéniable de la grande fragilité financière, mais aussi personnelle, de dirigeants », s’inquiète  le SDI.

Un tiers des TPE déclarent aussi rencontrer des difficultés pour rembourser leur PGE.

Selon le SDI, pour un entrepreneur demander un moratoire sur le remboursement de son PGE, interdit la possibilité d’obtention d’autres crédits et ressemble à l’entrée dans une procédure collective…

Un « modèle social » à bout de souffle

Le psychodrame national qui se joue à chaque fois que l’on remet en chantier la réforme des retraites, interroge les fondements et le devenir de notre « modèle social ».

Rappelons que ce « modèle » auquel les Français, des plus humbles aux élites technocratiques, se disent très attachés, est né il y a 78 ans du pacte historique noué entre les gaullistes et les communistes au sein du Conseil national de la résistance. Le CNR a adopté dans la clandestinité, le 15 mars 1944, un programme intitulé « Les Jours Heureux » qui a inspiré les grandes réformes économiques et sociales de la Libération, entre 1944 et 1946, telles les nationalisations d’entreprises ou la Sécurité sociale.  Les principes de ce programme sont inscrits dans le marbre constitutionnel, et dans le préambule de la constitution du 27 octobre 1946 comme dans celle de l’actuelle Cinquième République (1958).

La retraite par répartition a été mise en place à cette époque, pour donner aux citoyens, même ceux qui n’avaient jamais cotisé, le droit à une pension de retraite. C’est pour cela que la formule de la « répartition » a été choisie :les actifs payent pour donner un revenu aux retraités.

Et elle fonctionnait, car  il y avait alors 5 ou 6 actifs pour un retraité, la France était en situation de plein-emploi et l’espérance de vie au delà de 65 ans (âge légal de la retraite jusqu’en 1982)  était très faible.

Aujourd’hui tous ces paramètres de l’après-Guerre ont volé en éclat.

Le coût croissant de notre « modèle social »  : au cours des décennies on a vu augmenter le nombre et les domaines d’interventions et de prestations, et « s’universaliser » le nombre de ses bénéficiaires, y compris les non-contributeurs, dès lors le coût de cette protection sociale de plus en plus généreuse, a explosé, au prix d’un accroissement continu de la ponction sur les actifs, essentiellement le secteur privé productif, qui approche les 45% du PIB, soit plus de1000 milliards d’euros!

Un record dans les pays européens et de l’OCDE!

Parallèlement, au moment de la crise de la pandémie de Covid19, les Français se sont rendu compte que leur système de santé ne fonctionnait pas aussi bien qu’ils le croyaient, avec de nombreux dysfonctionnements, des pénuries, de la bureaucratie, une mauvaise coordination entre la médecine de ville et le secteur hospitalier…

La crise énergétique exacerbée par l’arrêt des fournitures de gaz russe en 2022 a mis a nu le mauvais état de nos infrastructures, notamment la fragilisation de notre parc nucléaire…

Et que dire de notre système scolaire qui laisse chaque année 150 000 jeunes sans diplômes et sans qualification, alors que les entreprises sont en manque de compétences et de talents.

La colère sociale qui s’exprime à l’occasion de cette nouvelle réforme des retraites, se nourrit probablement aussi de cette « déception » devant l’état de dégradation avancée de nos services publics que l’on croyait parmi les meilleurs au monde…

Les élites intellectuelles et dirigeantes portent leur part de responsabilité dans cette situation, en ayant entretenu l’illusion que la France avait toujours les moyens de s’offrir un « modèle social » aussi généreux.  Alors que le nombre d’actifs, le taux d’emploi et le nombre total d’heures travaillées sont beaucoup plus faibles en France que chez nos voisins européens.

Les élites intellectuelles et dirigeantes portent leur part de responsabilité en ayant repoussé indéfiniment la nécessaire réforme de notre mille-feuille administratif et bureaucratique aussi tentaculaire qu’impotent.

Les élites intellectuelles et dirigeantes portent leur part de responsabilité en ne prenant pas exemple sur les initiatives et innovations sociales qui fonctionnent dans d’autres pays européens.

Les élites intellectuelles et dirigeantes portent leur part de responsabilité en ayant fait croire que la digitalisation des échanges, la généralisation des activités de divertissement et de loisirs sonnaient la fin du travail productif et que l’Etat-Providence pouvait distribuer à chacun un « revenu universel d’existence », qu’il était possible de conjuguer « travailler moins » avec « gagner plus »…

Remise à plat. Avec l’inconnue de l’issue des mouvements de protestation qui enflent actuellement, 2023 pourrait être une année utile si elle permet de réévaluer la viabilité de notre » modèle social », d’opérer une remise à plat de notre État-Providence, de revitaliser le paritarisme dévoyé par la technocratie, et de redéfinir, avec l’ensemble des acteurs, les rôles respectifs du secteur public, des entreprises privées et de la société civile.

J.G.

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