La crise sanitaire se prolonge, la relance tarde, les PME s’alarment

La crainte d’un nouveau confinement, une conjoncture en dents de scie, le mur des dettes… attisent l’inquiétude des chefs d’entreprise. En l’absence de calendrier de retour à la normale, et face au risque de faillites en cascades, un programme de relance économique apparaît aussi urgent que nécessaire. L’État est à la manœuvre, intervenant sur tous les fronts et creusant ses déficits. Jusqu’à quand pourra-t-il tenir sa promesse du « Quoi qu’il en coûte »?

 

 

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Quand l’économie française va-t-elle rebondir?

Si le gouvernement maintient sa prévision de croissance de 6% pour l’année 2021, après une chute du PIB  de  – 8,3% en 2020, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, avoue qu’il faudra attendre le second semestre pour connaître un véritable rebond économique, lequel  devrait être « très significatif, comparable à celui que nous avions enregistré au troisième trimestre de l’année passée ».

L’incertitude persistante sur le front sanitaire (nouveaux « variants » du Covid-19; retards dans les vaccinations; durcissement des restrictions) rend de plus en plus problématique l’atteinte de cet objectif.

Pour l’économiste Patrick Artus, un mois de confinement diminue d’un point le taux de croissance annuel… Dans une récente intervention pour le Cercle des économistes, il estime quant à lui le taux de croissance en 2021 à entre 4% et 5%. Ce qui ne compenserait que très partiellement la perte de richesse nationale subie en 2020.

Selon Groupama Asset Management,  l’impact de la dégradation de la situation sanitaire en Europe se traduira par un nouveau ralentissement de l’économie au premier trimestre 2021 dans la zone euro:

« Une nouvelle récession est inévitable pour l’économie de la zone euro, soit deux trimestres consécutifs de contraction de PIB (T4-2020 et T1-2021) mais la baisse de l’activité est nettement moins sévère que celle observée au printemps dernier. Les mesures de restriction sont généralement beaucoup moins contraignantes, permettant ainsi une relative bonne tenue du secteur manufacturier, soutenu lui-même par un raffermissement de la demande mondiale. » Cette appréciation générale recouvre de fortes disparités entre les pays de la zone monétaire.

Maryse Pogodzinski, économiste chez Groupama Asset Management, estime qu’à court terme, « l’activité va rester fortement dépendante de la situation sanitaire : L’économie de la zone euro reste sur un terrain fragile en ce début d’année. La prolongation et/ou le renforcement des mesures de restriction dans la plupart des pays de la zone euro pour contenir la 3ème vague valide le scénario d’une nouvelle récession au tournant de l’année mais d’une ampleur nettement moins sévère que celle enregistrée au printemps dernier. »

Une des meilleurs performances de la Zone euro dans une « incertitude exceptionnelle »:

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Le Fonds monétaire international (FMI), pour sa part, prévoit un taux de croissance de 5,5% pour la France cette année, soit une des meilleures performances de la Zone euro avec l’Espagne ( et 3,5% pour l’Allemagne, qui a connu, il est vrai, une récession près de deux fois moins forte que celle de l’Hexagone en 2020).

Selon le FMI, qui qualifie le contexte actuel d' »incertitude exceptionnelle », l ’activité économique dans le monde devrait « s’affermir plus tard dans l’année grâce aux vaccins et sous l’effet de mesures de soutien supplémentaires dans un petit nombre de grands pays : l’économie mondiale devrait connaître une croissance de 5,5 % en 2021, puis de 4,2 % en 2022″.

Toutefois, l’institution internationale, avertit que « la vigueur de la reprise devrait varier considérablement d’un pays à l’autre en fonction de leur accès aux interventions médicales, de l’efficacité des mesures de soutien, de leur exposition aux effets de contagion entre pays, et de leurs caractéristiques structurelles à l’aube de la crise… »

Le FMI recommande que l’action des pouvoirs publics puisse « assurer un soutien efficace jusqu’à ce que la reprise soit fermement enclenchée, en mettant l’accent sur des priorités impératives, à savoir relever le potentiel de production, garantir une croissance participative profitant à tous et accélérer la transition vers une économie moins tributaire du carbone. »

On notera que la Chine, d’où est partie fin 2019 le coronavirus Covid-19 responsable de la plus grave pandémie du 21ème siècle, restera le seul grand pays a réaliser un taux de croissance économique positif en 2020, avec 2,3% de progression du PIB.  Une croissance économique qui pourrait atteindre les 8,1% en 2021!

 

Le climat des affaires en France: mitigé

Dans son enquête mensuelle auprès des chefs d’entreprise (interrogés le 28 décembre 2020 et le 18 janvier 2021), l’Insee note une très légère amélioration dans la perception du climat des affaires en France, mais « l’indicateur reste nettement au-dessous de sa moyenne de longue période », tempère l’Institut de la statistique…

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« Le climat des affaires dans l’industrie entame l’année 2021 en progrès, note l’Insee; l’opinion des entrepreneurs du bâtiment sur leur activité pour les trois prochains mois s’améliore de nouveau, (mais) la confiance des ménages se replie »…

« Cette très légère hausse dans le climat des affaires est le reflet d’évolutions différentes suivant les secteurs d’activité, en lien avec l’incertitude quant à l’évolution de la situation sanitaire. Le climat des affaires s’améliore dans l’industrie par rapport au mois dernier et dans le commerce de gros par rapport à novembre, tandis qu’il fluctue à peine dans les services et le commerce de détail. Dans le bâtiment, les entrepreneurs se disent plus optimistes qu’en décembre sur leurs propres perspectives, mais portent un jugement plus sombre sur leur activité récente. »

Une économie à deux vitesses

 

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A côté des secteurs qui tirent leur épingle du jeux, de nombreuses entreprises, notamment PME et TPE sont confrontées à de réelles difficultés et s’inquiètent pour leur avenir.

Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, le reconnaît dans une interview au quotidien Les Echos du 22 janvier 2021: « Il y a en ce moment deux économies : celle qui est au désespoir, frappée de plein fouet et celle qui a déjà redémarré. Il faut protéger la première et accompagner le rebond de la deuxième. »

Le ministre qui est monté au créneau depuis un an pour multiplier les dispositifs d’aide et de soutien aux entreprises pénalisées par les mesures de lutte contre la pandémie, insiste sur la nécessité « d’engager sans délais la relance », notamment via le déploiement du Plan France Relance (voir plus bas).

Un message que le ministre a réitéré le 26 janvier devant la commission des Finances du Sénat qui l’auditait sur le Plan de relance (voir plus bas).

Si des secteurs comme le commerce d’alimentation, les BTP, les transports de proximité, les services et produits numériques, s’en sortent bien (cf. le boom des deux roues, des marchands de vélos se retrouvant en rupture de stocks!), de nombreuses activités sont en souffrance depuis un an : bars, restaurants, voyagistes, transport aérien, hôtels, agences d’événementiel, cinémas, théâtres, cirques, salles de sport, commerces de prêt à porter, d’ameublement, viticulteurs…

A cette liste de métiers directement pénalisés par les décisions régaliennes de restrictions sanitaires, s’ajoutent les fournisseurs et grossistes de la restauration, des loisirs touristiques, des stations de ski…

Président de la délégation sénatoriale aux entreprises, le sénateur Serge Babary (LR) s’alarme que « l’évolution actuelle de la pandémie assombrit les perspectives du premier semestre 2021 et nous sommes particulièrement inquiets pour les TPE-PME qui ne parviennent plus à se projeter dans les prochains mois. » Une déclaration faite lors d’une séance de travail sur le thème : « Difficultés des TPE et PME dans la crise : comment franchir le cap du 1er semestre 2021 ? »

Laurent Munerot, président de l’U2P

 

Témoignant devant la délégation sénatoriale, Laurent Munerot, président de l’Union des entreprises de proximité, U2P, soulignait: « Des dommages collatéraux viennent s’ajouter aux fermetures administratives : les pratiques de télétravail, notamment, ont entraîné des changements d’habitude de consommation et de localisation des achats, aboutissant à d’importantes baisses d’activité et de chiffre d’affaires pour certaines entreprises. Une enquête que nous avons réalisée sur le quatrième trimestre de l’année 2020 a montré qu’un peu plus de 70 % des entreprises interrogées – artisans, commerçants alimentaires de proximité, hôtels, cafés, restaurants (HCR) et professions libérales – ont estimé subir une baisse d’activité et de chiffre d’affaires, baisse de l’ordre de 25 % pour 31 % de ces entreprises. »

 

Doutes. Certes, les mesures de soutien gouvernementales, les reports de cotisation, l’accès au crédit de trésorerie via les PGE, ont apporté à ces entreprises un ballon d’oxygène bienvenu, mais, au fur et à mesure que s’éloigne le retour à une activité normale, l’inquiétude grandit dans leurs rangs.

Surtout quaucun calendrier d’ouverture n’est donné aux professionnels de la restauration, des spectacles, de l’événementiel, du tourisme-hôtellerie…

Un manque de perspectives très pesant en ce début d’année 2021, où la vaccination a été assimilée à une sortie rapide de la crise, alors que les retards et désorganisations dans sa mise en œuvre nourrissent les déceptions et la défiance à l’égard des autorités.

Par ailleurs le choix politique de « mettre sous perfusion » financière les entreprises dès le premier confinement, en mars 2020, s’il a permis de contenir une flambée du chômage et des faillites, se révèle au fur et à mesure que le temps passe très dispendieux pour l’État qui creuse ses déficits (1). Et de plus en plus d’observateurs se demandent jusqu’à quand la promesse d’Emmanuel Macron du « Quoi qu’il en coûte » pourra être tenue…

Un an après le début de la pandémie, la fatigue et les déconvenues commencent à saper le moral des entrepreneurs, pourtant d’un caractère combattif.

Au nombre des motifs d’inquiétude, la crainte de ne pas être en mesure d’honorer les échéances reportées et le remboursement des nouveaux emprunts qui ont souvent alourdi un endettement initial des PME.

(1) Le déficit du budget de l’État en 2020 devrait dépasser le montant historique de 220 milliards d’euros (contre 93 milliards en 2019), soit presque l’équivalent des recettes publiques! Du jamais vu! – Des recettes en baisse du fait de la moindre activité… L’État est donc contraint de s’endetter à tour de bras. Seule consolation, il s’endette à « bon compte »: en 2020 il a pu lever 290 milliards d’euros à un taux d’intérêt négatif (-0,14%)

 

Des entreprises « sous perfusion » d’argent public

Selon une enquête de la Confédération des PME publiée le 26 janvier *,  45% des 220 000 entreprises ayant utilisé leur PGE (sur un total de 630 000 bénéficiaires) doutent de leur capacité à rembourser ce prêt garanti par l’État »

49% des entrepreneurs interrogés par la CPME se disent dans l’incapacité de supporter un troisième confinement!

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Face au manque de visibilité des perspectives économiques,  la majorité des dirigeants de PME (54%) craignent aujourd’hui pour la pérennité de leur entreprise.

Au cours des deux derniers mois de 2020, précise la CPME, les deux tiers des entreprises (65%) ont connu une baisse de chiffre d’affaires par rapport à la même période en 2019 : Soit pour la moitié d’entre elles (52%) une dégradation de leur trésorerie.

« Pour 2021, les perspectives sont mitigées mais pas catastrophiques, estime néanmoins la Confédération : si 52% des répondants prévoient une baisse de chiffre d’affaires dans les prochains mois, 48% anticipent un maintien ou même une hausse.

De même, si 25% envisagent de réduire leurs effectifs, 66% pensent le maintenir et 9% prévoient de recruter. 55% des PME envisagent de conserver un ou plusieurs jours de télétravail à l’issue de la crise sanitaire

Près de la moitié des répondants (49%), estiment que la crise a accéléré leur transition numérique.

Ainsi beaucoup de commerces se sont rapidement converti à l’omnicanal  via le click and collect notamment.

Toutefois 33% des TPE/PME interrogées par la CPME ont le sentiment que leur entreprise est « sous perfusion de l’État » et  seules 3% d’entre elles ont répondu, ou s’apprêtent à le faire, à un appel à projet dans le cadre du plan de relance.

*2400 dirigeants de TPE/PME ont répondu à l’enquête de la CPME, entre le 7 et le 20 janvier 2021.

 

Le dernier baromètre réalisé par le Syndicat des Indépendants (SDI) révèle que, malgré les aides du gouvernement, 51% des indépendants estiment difficile à catastrophique la situation de leur trésorerie. Pour 84% d’entre eux, c’est une baisse de 10 à 50% du chiffre d’affaires annuel qui est constatée sur l’année 2020, comparée à 2019.

« Le moral est au plus bas pour les dirigeants de TPE, petits commerces, artisans qui font toujours face à un mur de dettes et ne voient pas le bout du tunnel. Si rien n’est fait, la vague de faillite est inévitable pour les indépendants, s’alarme Marc Sanchez, secrétaire général du SDI.

Les besoins en capitaux propres deviennent encore plus pressants

Selon l’institut d’études économiques Rexecode, proche des milieux patronaux,  les entreprises devraient  être confrontées en 2021 à d’importants besoins de financement : « En France, leurs résultats d’exploitation pourraient chuter de près de 20% en 2020 et la structure de leur bilan se déformer avec la hausse de l’endettement et l’érosion de leurs fonds propres… »

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« La canalisation de l’épargne vers le financement des entreprises sera un levier clé pour éviter une stagnation économique durable par défaut d’investissement productif, et pour commencer à envisager débrancher la perfusion publique qui nourrit l’économie mondiale », analyse Rexecode.

Les besoins de fonds propres se feront plus pressants en 2021, à partir du moment où les différents dispositifs d’aides et de soutien publics, mis en place en 2020, se réduiront ou s’arrêteront. Lorsque prendra fin la fameuse injonction « Quoi qu’il en coûte »

D’autant que la structure du bilan comptable de nombreuses PME et TPE était déjà très fragile avant la crise, comme cela avait été souligné par différentes études.

Il risque de se produire un effet « ciseaux » entre des échéances à honorer(reprise des remboursements reportés) et une montée en puissance plus faible du chiffre d’affaires.

Stéphanie Pauzat, vice-présidente déléguée de la CPME (DR)

S’exprimant devant la délégation sénatoriale aux entreprises, Stéphanie Pauzat, vice-président déléguée de la CPME, a jugé que la proposition de transformer certains PGE en fonds propres était « une bonne idée ».  Nous proposons aussi, a-t-elle ajouté, afin de renforcer la solidité de l’entreprise, d’autoriser le basculement d’une partie des résultats en fonds propres, moyennant une réduction fiscale. »

Un crédit de consolidation. « Pour éviter les faillites en cascade, nous proposons de modifier l’ordre des créanciers, de telle sorte que les entreprises deviennent des créanciers de premier rang, à la place de l’État.  Quant aux entreprises qui ont souscrit un PGE,  cette dette s’ajoute à celles qu’elles avaient déjà contractées auparavant. Et elles doivent continuer à acquitter leurs autres charges,… C’est pourquoi, nous préconisons la mise en place d’un prêt de consolidation, à l’image du prêt de restructuration pour les particuliers, afin de grouper l’ensemble des dettes et d’étaler les remboursements sur une durée accrue, ce qui permet de diminuer les charges à court terme et de redonner à nos entreprises une bouffée d’oxygène.

La CPME demande aussi que la dette Covid puisse être circonscrite dans le bilan comptable afin de ne pas dégrader la cotation de l’entreprise par les assureurs-crédits, laquelle conditionne les modalités de paiement et l’appréciation de la solvabilité des PME.

Faillites : un rattrapage aura forcément lieu en 2021

crédit photo : Pete Linforth – Pixabay

Le calme avant la tempête. 2020 apparaît comme une année atypique, car en raison des nombreuse mesures d’aides et de soutien aux entreprises le nombre de défaillances*, 32 000, est au plus bas depuis 30 ans, enregistrant une baisse de 40 % par rapport à 2019!

Derrière ces chiffres en trompe-l’œil, la société Altares pointe cependant des signaux d’alarme comme « la proportion inquiétante de liquidations judiciaires directes, la baisse des procédures de sauvegardes et le nombre d’emplois menacés qui reste élevé en dépit de la baisse globale du nombre d’entreprises en faillite. »

Pour Thierry Millon, directeur des études d’Altares, « l’engagement du « quoi qu’il en coûte » pris par le Président de la république en mars dernier a évité que la violente crise économique ne vienne noircir les registres des tribunaux de longues listes de faillites Covid-19. Le niveau de défaillances de 2020 s’apparente pourtant à une anomalie statistique. Les adaptations juridiques, administratives et soutiens en trésorerie ont permis aux entreprises de se prémunir du défaut de paiement, sans quoi le pire était à redouter. Les précédents records de défaillances, proches de 65 000, auraient été largement dépassés…. Naturellement nous devons anticiper une forte augmentation du nombre de défaillances au regard de 2020 ; a minima un retour à la situation de 2019 (52 000) et probablement davantage si aux accidentés du Covid devaient s’ajouter un grand nombre des 20 000 entreprises épargnées de 2020. »

« 2021 mais aussi 2022 verront le risque de défaut de paiement s’accroitre fortement pour des milliers d’entreprises, provoquant un autre risque pour les fournisseurs : celui de la propagation de la défaillance des clients. Gare à l’effet domino !  » Thierry Millon, Altares

* La défaillance d’entreprise correspond à l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, redressement judiciaire ou liquidation judiciaire directe auprès d’un Tribunal de Commerce ou Judiciaire. Cela ne recouvre donc ni les procédures amiables (mandat ad ’hoc ou conciliation) ni les suites d’ouverture (arrêt de plan ou conversion en liquidation).

 

Même diagnostic d’ Euler Hermes France,  qui prévoit un nombre total de défaillances à la hausse en France au cours des deux prochaines années : 45 000 entreprises devraient faire défaillance en 2021, et plus de 60.000 en 2022.

Chez les professionnels du commerce, la fédération Procos qui regroupe les enseignes du commerce de détail spécialisé, enregistre plus de 2 200 fermetures définitives de magasins au cours des douze derniers mois, soit près de 8000 emplois perdus, et s’attend à d’autres défaillances cette année, notamment dans les secteurs frappés de fermeture administrative comme la restauration.

Pour les indépendants, les conséquences d’une faillite sont souvent plus graves que pour une société qui dépose le bilan…

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La CPME s’en alarme et demande des mesures spécifiques: « La défaillance d’un indépendant conduit bien souvent à sa mise en cause financière à titre personnel. Cette règle est connue et acceptée en temps normal. Elle devient profondément injuste lorsque ces entrepreneurs individuels n’ont commis aucune faute de gestion ni erreur d’appréciation et sont simplement victimes de décisions administratives justifiées par la situation financière.

« Certains se retrouvent dans l’incapacité brutale de subvenir à leurs besoins les plus élémentaires et n’ont d’autres solutions que de recourir au RSA. D’autres vont jusqu’à attenter à leurs jours. Les soutenir est un devoir.

« Leur réclamer, à titre personnel, des mois ou des années après la liquidation de leur entreprise, des reliquats de cotisations au titre des périodes antérieures, les plonge davantage encore dans la détresse. La CPME propose donc de lier la dette vis-à-vis de la Sécurité sociale des travailleurs indépendants (SSTI) à l’existence-même de l’entreprise.

« De même, il serait cohérent que les circonstances exceptionnelles liées à la Covid-19 puissent être considérées comme un cas de force majeure permettant au travailleur indépendant de voir, au moins temporairement, sa caution personnelle suspendue en cas de défaillance.

« Par ailleurs, il est injuste de marquer au fer rouge les travailleurs indépendants privés de revenus et dans l’incapacité temporaire d’honorer le paiement d’échéances de crédit personnel, en empêchant tout rebond ultérieur. La CPME réclame donc la suspension de l’inscription au Fichier des incidents de remboursement de crédits (FICP) des travailleurs indépendants n’ayant jamais connu d’incidents de paiement avant mars 2020. »

 

Un Plan de relance à actualiser

Conçu avant la pandémie de Covid-19, le plan France Relance rendu public en septembre 2020 et qui prévoit une enveloppe de 100 milliards d’euros d’engagements, pourrait se révéler insuffisant ou inadapté pour redresser rapidement une économie terrassée par une crise sanitaire interminable.

Certaines voix demandent que son enveloppe soit doublée, mais avec un endettement public qui dépasse désormais les 120% de son PIB, la France en a-t-elle vraiment les moyens?

Il faudrait aussi une vaste campagne d’information et d’explication pour que dans les profondeurs des territoires, les PME s’approprient ce plan de relance. Or l’enquête récente de la CPME révèle que seules 3% d’entre elles ont répondu, ou s’apprêtent à le faire, à un appel à projet dans le cadre du plan de relance.

Bruno Le Maire veut toujours y croire, comme il l’a réaffirmé dans son interview aux Echos : « Notre priorité c’est d’aller plus vite et de décaisser plus que les 40 milliards d’euros en 2021. La clé de la réussite du plan France Relance, c’est son exécution. Il y a 100 milliards d’euros de prévu et des dispositifs qui rencontrent un succès spectaculaire. Je pense par exemple au guichet pour la numérisation d’entreprises industrielles, avec près de 7 000 dossiers déposés. Ou encore à l’ensemble des appels à projets pour l’industrie, avec fin 2020,  815 projets retenus, dont 70 % de PME. « 

Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance

Lors de ses vœux en visioconférence à la presse le 12 janvier, le ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, s’est montré volontariste : « nous allons accélérer la relance économique sur la base du Plan de relance parce que c’est maintenant que se joue l’avenir de la France pour les vingt-cinq prochaines années et que des décisions que nous prenons maintenant, des investissements que nous faisons maintenant, dépend la puissance économique de la France pour les vingt-cinq prochaines années. (…)

« La digitalisation des PME industrielles sur lesquelles tout le monde sait que nous avons un retard, nous avions prévu 280 millions d’euros. Nous sommes déjà à près de 700 millions d’euros de demandes et nous allons ajuster les dispositifs pour répondre à ces besoins financiers pour la digitalisation des PME industrielles.
MaPrimeRénov’ c’est 190 000 demandes en 2020, dont 100 000 dans les quatre derniers mois de l’année 2020, en raison du Plan de relance.
Enfin, les aides à la relocalisation des entreprises industrielles. Nous avons déjà sélectionné plus de 800 projets industriels pour 3,4 milliards d’euros d’investissement grâce au Fonds de la relance.(…)

« Nous allons  créer des nouvelles chaînes de valeur dont dépend le redressement économique
français »,  Bruno Le Maire

La crise nous donne une opportunité historique unique pour enfin créer ces nouvelles chaînes de valeur
que nous n’avons pas su créer depuis 30 ans en France.

« Nous allons le faire dans la santé, dans l’intelligence artificielle, dans l’hydrogène, dans les énergies renouvelables, dans le calcul quantique, dans l’espace.

–  » Avec le Premier ministre, nous avons fait le point dans un conseil de l’innovation il y a quelques jours, sur ces nouvelles chaînes de valeur et sur l’accélération de la mise en place de ces chaînes de valeur pour voir quand nous pourrons décaisser rapidement l’argent et qu’il aille vers des contrats concrets dans des PME, dans des entreprises de taille intermédiaire ou dans des start-ups dans les meilleurs délais possibles.
 (…)

« Ce n’est pas le ministre de l’Économie et des Finances qui est tout seul dans son bureau, entouré de
ses conseillers et dit « Tiens, on va créer trois nouvelles filières industrielles. » Cela vient des
entreprises elles-mêmes. Cela vient du monde de la recherche. Cela vient des start-up, cela vient des
marchés qui sont aujourd’hui en expansion. Notre stratégie vient donc d’abord de la base à laquelle
nous apportons les moyens financiers nécessaires en fonction des compétences dont nous disposons,
du tissu industriel qui est le nôtre et du dynamisme du marché. »

Pour sa part la fédération Procos, estime que ce Plan de relance ne répond pas suffisamment aux enjeux de la transformation du commerce, qu’il faut imaginer des dispositifs pour accélérer sa digitalisation, pour favoriser son engagement RSE et une consommation écoresponsable. Procos compte sensibiliser les pouvoirs public sur la nécessité de définir une vison du commerce à l’horizon 2030, un secteur qui représente 12% du PIB et quelque 2 millions d’emplois directs et indirects « non-délocalisables ».

 

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